Dans le
silence complice de sa chambre, elle avait enfin osé.
La femme
qu'elle était devenue, mûrie par les épreuves et les étés, avait longtemps
porté le poids d’interdits qu’elle n’avait jamais osé briser. Pourtant, ce
soir-là, quelque chose en elle avait changé. Peut-être était-ce cette solitude
qu’elle n’avait jamais vraiment apaisée, ou ces livres posés sur sa table de
chevet, qui lui avaient parlé d’une liberté qu’elle n’avait jamais goûtée.
Elle
s’est laissé dépouiller de sa honte par ses doigts, ses mains qui savaient
prendre soin de ses vices. D'abord, avec une timide lenteur, comme si elle
s'excusait d'oser franchir cette barrière invisible qu'elle s'était elle-même
imposée. Puis, doucement, la pudeur s'est effacée. Le miroir face à elle
reflétait une femme qu’elle redécouvrait, ses courbes douces baignées par la
lumière tamisée d'une lampe oubliée allumée. Elle s'observait avec un œil
nouveau, celui de l'acceptation, celui du désir.
Chaque
geste était une révélation, chaque caresse une étincelle. Ses doigts glissaient
sur sa peau avec une assurance qu’elle ignorait posséder, trouvant des chemins
qu’elle n’avait jamais explorés. Elle ne pensait plus, elle ressentait. La
femme qu’elle avait longtemps enfermée, la mère, l’épouse, celle qui avait
toujours été au service des autres, se révoltait. Elle devenait sa propre
amante.
Rencontrer
enfin la jouissance libératrice... Elle comprenait ces mots maintenant. Un feu
qu’elle pensait éteint depuis longtemps renaissait, consumant doucement mais
irrémédiablement les doutes et les regrets. La première onde de plaisir fut
comme un choc, une vague qu'elle accueillit dans un murmure étouffé. Ses jambes
tremblèrent, ses mains s’agrippèrent à ses draps, et elle perdit pied. Oser,
c’était effectivement perdre l’équilibre… mais ne pas oser, ça aurait été se
perdre soi-même.
Quand
elle s'abandonna à cette vague finale, elle sentit une légèreté nouvelle
envahir son âme. Là, au cœur de cette nuit silencieuse, une femme libre était
née. Elle sourit, ses yeux fixant toujours son reflet. "Je suis moi",
murmura-t-elle, avant de laisser ses paupières se fermer sur le frisson qui
s’éteignait doucement.
Cette
nuit-là, elle avait enfin appris que l’abandon à soi était une forme ultime de
puissance.
©
copyright Marc Vongotha 63
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