Leone Frollo : des grandes plaines du western
à l’univers troublant de l’érotisme dessiné
Le
parcours singulier d’un maître italien du fantasme graphique
Leone
Frollo (1931–2018) fait partie de ces dessinateurs inclassables, ayant traversé
les genres et les époques, jusqu’à s’imposer comme une référence incontournable
dans l’univers de la bande dessinée érotique. Sa carrière débute dès 1948 avec
Sui Grandi Laghi (« Sur les grands lacs »), un western aux grands airs
d’aventure classique. Mais c’est bien plus tard, dans des eaux bien plus
sensuelles, qu’il déploiera toute sa subtilité graphique.
Entre
1958 et 1968, Frollo travaille à l’agence Fleetway de Londres, produisant des
histoires de guerre pour le marché britannique. Loin de l’érotisme, cette
décennie le forme à la rigueur du dessin narratif et à l’efficacité du
découpage. Mais l’Italie des années 1970-80 s’ouvre à d’autres désirs, d’autres
formes d’imaginaire…
Quand
Blanche-Neige se dénude : Biancaneve et l’explosion d’Edifumetto
C’est à
partir du milieu des années 1980 que Frollo entame sa mue artistique. Il plonge
alors dans l’érotisme et la sensualité pure, collaborant avec la légendaire
maison d’édition italienne Edifumetto, spécialisée dans les fumetti pour
adultes. Il y crée Biancaneve, une variation sulfureuse du conte de
Blanche-Neige. Ici, la princesse devient un être voluptueux, prisonnière de ses
désirs, évoluant dans un univers à la fois féérique, grotesque et débridé.
En
France, cette série paraît chez Elvifrance sous le titre Contes malicieux,
véritable bible de la BD licencieuse des années 70-80. Les amateurs y
retrouveront des thèmes chers au BDSM : domination, tentation, ambivalences des
figures féminines et masculines, dans une esthétique délicieusement rétro.
Une
esthétique douce, presque sucrée, pour des scènes de débauche délicate
Frollo
est un paradoxe fascinant : ses personnages semblent sortir de cartes postales
anciennes, avec leurs boucles sages et leurs corsets serrés. Mais derrière ces
visages angéliques, tout explose. Les postures sont lascives, les corps tendus
par le plaisir ou l’attente, les regards chargés de soumission ou de
provocation. Il y a chez lui un raffinement érotique qui flirte avec la
perversion polie — le BDSM y est souvent suggéré, contenu, d’autant plus
troublant.
De la BD
aux illustrations fines : Mona Street, Diva, et le dernier souffle érotique
Après
1987, Leone Frollo change de cap stylistique et produit plusieurs œuvres
destinées au marché français : Malicieusement femmes, Diva et surtout Mona
Street. Cette dernière série raconte les aventures érotiques d’une jeune
diplômée américaine au début du XXe siècle. C’est à la fois une chronique
sociale, une initiation aux plaisirs du corps et un bijou graphique à la
sensualité subtile.
Ce sera
sa dernière bande dessinée. Par la suite, Frollo délaissera les planches pour
se consacrer à des œuvres uniques sur papier : aquarelles, pastels, dessins au
crayon. Son style devient plus libre encore, et plus onirique. L’univers BDSM
n’y est pas toujours frontal, mais toujours en filigrane, dans les jeux de
poses, les accessoires, ou les regards d’attente.
Héritage
et influence
Leone
Frollo laisse derrière lui un héritage singulier : une sensualité élégante,
rétro, parfois teintée de cruauté douce. Il n’a pas cherché à choquer, mais à
éveiller — dans l’intimité du regard, il a mis en scène des fantasmes sans
jamais les juger.
Dans
l’univers BDSM, son œuvre peut sembler trop “douce” pour certains. Pourtant,
c’est dans cette douceur même que se cachent les promesses les plus brûlantes.
Entre les lignes de ses dessins, tout est possible : le fouet, la contrainte,
la reddition.
Ce
recueil regroupe l'ensemble des histoires courtes de Leono Frollo, depuis ses
premiers pas dans l'érotisme dessiné, au cours des années 1970, jusqu'à ses
bandes dessinées publiées dans Diva, l'élégante revue italienne des années
1980. La Belle Éplorée, qui donne son titre au recueil, est un hommage à John
Willie. Ses autres histoires balayent tous les genres : aventure, science-
fiction, bondage.
Vaste
programme dans le bordel tenu par madame Georgette : il suffit d'allonger, puis
de s'allonger. Dans "Meules d'or", une nouvelle prostituée refuse de
montrer son sexe, on se demande pourquoi... Dans "Seize trous pour un
mâle", il ne faut pas forcément seize trous pour un mâle. Dans "Le
Roi des baiseurs", Arsène Lapine s'adonne au passe-passe pour ne pas payer
ses passes. Trois nouvelles histoires érotico-porno pour se fendre la pipe.
Casino est la série culte de l'immense Leone Frollo, surnommé le lion de
Venise, l'égal de Manara et Crepax. On lui doit de magnifiques dessins qui
célèbrent les prostituées, femmes fatales et les pin-up. C'est la première fois
que Casino paraît en France non censuré, en respectant le principe du format
d'origine.