vendredi 23 mai 2025

Le Fouet de Martine Roffinella

 



"Plaisirs littéraires : Érotisme et Soumission"

 

"Bienvenue dans notre espace dédié à la littérature érotique et SM, où les mots prennent vie pour explorer les profondeurs du désir et les subtilités de la soumission. Ici, vous découvrirez des auteurs audacieux, des œuvres captivantes, et des idées de lecture qui éveilleront votre esprit et enflammeront vos sens. Que vous soyez curieux ou passionné, laissez-vous guider dans cet univers où l'imaginaire sublime la volupté et la transgression. Bonne découverte et lectures enivrantes!"




Le Fouet de Martine Roffinella

 

 

"Le Fouet" de Martine Roffinella est paru en 2000 chez Phébus puis en édition limitée dans la collection Points en 2009. Je vous recommande vivement la lecture de ce bref récit de 125 pages, dont tout est résumé dans le premier chapitre que voici :

 

" J'ai longtemps accepté sur mon corps ce que je rêvais d'infliger aux autres. Des coups. Des punitions méritées. Des châtiments exemplaires pour mes fautes commises.

 

J'exposais mon dos aux griffures, aux sillons gravés par la boucle d'une ceinture. Aux écorchures laissées par des ongles précis et rapides. Faufilage incessant d'une machine à coudre, qui rectifiait ma peau par endroits pour l'agrafer ailleurs. J'étais couverte de "pièces", de tissus de chair superposés. Plus les zébrures me transformaient en chandail raccommodé, plus je désirais être ravaudée, vulgairement rapetassée. Pour tenir encore. Et affronter d'autres crachats. L'insulte qui accompagnait le geste me portait quelquefois au plaisir ; au cri unique que je lâchais, haletante, pétrie de douleurs et de pardons enfin accordés.

 

L'instant qui suivait l'orgasme virait évidemment au cauchemar.

 

La mouillure que je sentais glisser à mon entrejambe l'interdisait la rédemption. Ma mouillure odorante, gluante ; cette fange liquoreuse issue de mon sexe indiscipliné. Une assemblée de morts surgissait dans mon lit bientôt transformé en espace d'accusation. Tel oncle décédé revenait me fustiger ; tel grand-père me rappelait que j'avais connu ma première relation interdite le jour de son enterrement.

 

Au bout du compte, Dieu finissait toujours par me condamner à l'Enfer. Ici. Parmi les femmes. Victime expiatoire des femmes.

 

Leur putain, en somme. Et jusqu'à la nuit des temps.

 

Je me vengerai, c'est sûr. D'ailleurs, j'ai acheté un fouet."

 

– Que fais-tu avec ce fouet ? me demande Jacqueline en rentrant de son travail. – Rien. J’ai trouvé drôle de l’acheter. La dame de la boutique n’en revenait pas. – Mais il ne te servira à rien... Nous n’avons même pas de chien à la maison. - Pas encore, dis-je simplement. » Celle qui dit « Je » ne tourne pas autour des mots. « J’ai longtemps accepté sur mon corps ce que je rêvais d’infliger aux autres. Des coups. Des punitions méritées. » Un fouet dans sa main va l’aider à inverser en elle le courant du désir, à vivre le sexe autrement que comme une humiliation consentie. Elle écume les quartiers chauds de Paris, puis les quartiers chics – où les dames du meilleur monde, surprises à l’heure du thé, cèdent sous la menace à ses caprices. Perversité, diront les âmes sages. Peut-être, mais c’est qu’aussi la vie – et le monde – ont été conçus par un Dieu pervers... même si nous prétendons l’inverse pour tenter de nous rassurer à bon compte. Une perversité en tout cas qui refuse le mensonge. Et qui ne va pas sans style.

Depuis Marc Cholodenko, rares ont été ceux, ou celles, qui ont osé pareille mise à nu, et qui l’ont fait avec cette belle rage.

Martine Roffinella est née en 1961. Elle connait un premier succès retentissant avec Elle publié aux Éditions Phébus en 1988. Elle est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages (quasiment tous parus chez Phébus) portant sur les relations amoureuses et les rapports de domination et sur l’obsession qu’elles peuvent engendrer.


Le Fouet de Martine Roffinella